Château Coudray-Salbart

Le plus ancien des châteaux de la commune d’Echiré est le château Coudray-Salbart. C’est l’une des plus célèbres forteresses de la France médiévale, remarquable non seulement pour son bon état de conservation générale, mais aussi et surtout pour la qualité de sa construction. Il se visite encore aujourd’hui par de nombreux touristes, guidés par les membres de l’Association des Amis du château de Coudray-salbart. Ses hautes tours dominent la Sèvre Niortaise à deux kilomètres au nord du bourg d’Echiré. Son implantation sur les bords de ce cours d’eau était hautement stratégique.

Une sentinelle aux portes de Niort

[Marie-Pierre Baudry – Histoire et sauvegarde d’une forteresse innovante d’un site archéologique majeur – Le Picton n°204 | Novembre Décembre 2010].

Source : Château Coudray-Salbart. Collection Mairie d’Échiré 

Son histoire

En 1204, le roi de France Philippe Auguste reprend en main tous les domaines Plantagenêt, mais il échoue dans sa conquête du Poitou. Ce comté prend alors une importance stratégique considérable pour le roi d’Angleterre. Au début de l’année 1206, il débarque à La Rochelle avec une puissante armée et plus de deux cents bateaux. On le voit séjourner à plusieurs reprises à Saint-Maixent, Niort, Bressuire, Thouars et au château du « Coudray » – peut être le Coudray-Salbart –, qui apparaît alors pour la première fois dans les textes.

Le seigneur de Parthenay est l’un de ses plus fidèles alliés dans la région. Vaincu par Philippe Auguste qui assiège sa ville en 1207, il retourne vite dans les rangs du roi Jean sans Terre. Et lorsque ce dernier tente une nouvelle expédition sur le continent, en mai 1214, c’est à Parthenay même qu’il réunit son armée. L’échec de cette expédition et la signature d’une trêve avec le roi de France, éloignent de nouveau le roi d’Angleterre. À sa mort en 1216, les rentes des seigneurs poitevins sont suspendues ; ils entrent alors en conflit ouvert avec le jeune roi Henri III Plantagenêt. Pour faire pression sur ce dernier, ils font le blocus de Niort.

C’est dans ce contexte que le Coudray-Salbart apparaît avec certitude pour la première fois dans les archives. Il sert alors de base d’expédition militaire pour le seigneur de Parthenay et ses alliés – les Lusignan, Mauléon. Le Coudray-Salbart reste aux mains des seigneurs de Parthenay jusqu’au début du XVe siècle. À la mort du dernier héritier direct, le roi de France confisque la seigneurie et la remet à son sénéchal Arthur de Richemont, puis à Jean de Dunois. Un inventaire détaillé, levé en 1460, souligne la nécessité d’y engager des travaux. Ils n’ont jamais été effectués. Le château est rarement mentionné à la fin du Moyen Âge et il ne semble abriter qu’une garnison.

Il est détaché de la baronnie de Parthenay au début du XVIIIe siècle et vendu à plusieurs reprises. Oublié, le Coudray-Salbart n’est classé Monument Historique qu’en 1954. Il appartient depuis l’an 2000 à la Communauté d’agglomération de Niort qui a engagé un ambitieux programme de restauration.

La construction d’une forteresse innovante

Source : Le Picton n°204 | Novembre Décembre 2010].

Délaissant les collines où ils auraient pu asseoir un château dominant la plaine, les constructeurs ont choisi le confluent de la Sèvre niortaise et d’un ruisseau pour implanter cette puissante forteresse. Ce choix est stratégique. En ce point, une route enjambe le fleuve ; le pont moderne a pu remplacer un ancien passage que surveillait le château. La proximité du fleuve présente un autre avantage pour les constructeurs : la possibilité de transporter par voie fluviale des matériaux de construction. La pierre de taille calcaire a pu cependant être extraite sur place comme en témoignent de hauts fronts de taille abandonnés dans les fossés ; de petites carrières ont été exploitées jusqu’au début du XXe siècle aux alentours.[…] Le château proprement dit présente un plan régulier, presque rectangulaire (50 x 25 m), flanqué de six tours rondes. L’ensemble est isolé par de profonds fossés. La situation de la Grosse-tour à l’angle sud-est de l’enceinte est remarquable. […] Les cinq autres tours rondes sont toutes différentes, à deux ou trois niveaux présentant une grande diversité de voûtements : berceaux brisés, coupole, arcs de cloître, croisées d’ogives angevines.

La plus grande particularité du Coudray-Salbart est sans conteste la « gaine » qui relie les tours. Il s’agit d’un long couloir voûté en berceau, ménagé dans l’épaisseur du mur d’enceinte. […] Ces galeries défensives sont considérées comme un apport des croisades aux fortifications occidentales.

Mélusine, Fée Bâtisseuse

Issue de la culture populaire, Mélusine est associée à la famille des Lusignan. Raymondin, grand seigneur du Poitou, épouse une fée à l’incroyable beauté, qu’un sort transforme chaque samedi en femme-serpent. Elle fait promettre à son mari de ne pas chercher à dévoiler son secret, mais celui-ci transgresse l’interdit et révèle publiquement la nature de sa femme. Mélusine est aussi la mère de dix enfants dont huit sont affublés de quelques traits monstrueux. La légende veut que Mélusine, fée bâtisseuse, soit à l’origine de nombreuses villes dont Parthenay et des églises (comme celle de Saint-Paul-en-Gâtine ou de Clussais-la-Pommeraie). « Quelques dornées de pierres et une goulée d’Eve » (autrement dit : avec le contenu de trois tabliers de pierres et d’une gorgée d’eau) lui étaient nécessaires à l’élévation des plus imposantes forteresses. Elle construit en une nuit, ici un donjon, là un château dont, dit-on, le Coudray-Salbart grâce à la proximité de l’eau de la Sèvre Niortaise et des carrières de pierres.